Couverture du n° 118 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 118

Du langage dit inclusif

 

 

En absence des principaux intéressés, les écrivains, le langage dit inclusif se répand partout. De l’université au commerce et de l’administration à la publicité, rien n’est épargné. En absence des écrivains, à savoir de ceux dont la parole en la matière fait, a priori, autorité, on essaie d’imposer à l’ensemble de la société une conception de la langue étrangère à tout savoir établi et approuvé, et d’inventer des applications oscillant entre l’absurde et le ridicule. Il est urgent d’en discuter; c’est notre devoir. La langue est notre maison et le trésor que nous ont légué les générations qui nous ont précédé. De tous les sujets qui doivent faire débat dans toutes les couches de la population, celui du langage dit inclusif est d’une priorité absolue. Il va de la survie de notre société.
Et puis, nous parlons aussi des œuvres romanesques importantes (Kundera, Wallace) et, dans nos chroniques, cosmopolitisme oblige, nous survolons le monde de Los Angeles à Varsovie en passant par Montréal et le Cameroun. .

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Du langage dit inclusif

 

 

En absence des principaux intéressés, les écrivains, le langage dit inclusif se répand partout. De l’université au commerce et de l’administration à la publicité, rien n’est épargné. En absence des écrivains, à savoir de ceux dont la parole en la matière fait, a priori, autorité, on essaie d’imposer à l’ensemble de la société une conception de la langue étrangère à tout savoir établi et approuvé, et d’inventer des applications oscillant entre l’absurde et le ridicule. Il est urgent d’en discuter; c’est notre devoir. La langue est notre maison et le trésor que nous ont légué les générations qui nous ont précédé. De tous les sujets qui doivent faire débat dans toutes les couches de la population, celui du langage dit inclusif est d’une priorité absolue. Il va de la survie de notre société.
Et puis, nous parlons aussi des œuvres romanesques importantes (Kundera, Wallace) et, dans nos chroniques, cosmopolitisme oblige, nous survolons le monde de Los Angeles à Varsovie en passant par Montréal et le Cameroun. .

Sommaire

SOMMAIRE

Couverture du n° 118 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 118

Du langage dit inclusif

 

 

SOMMAIRE

Ouverture

François Taillandier, L’inclusivisme est à nos portes
Belinda Cannone, Il était une fois – Du genre dans la littérature
Jean-Michel Delacomptée, Sermon sur la misère de l’écriture inclusive
Reynald Lahanque, Art inclusif (d’après Paul.e Verlain.e)
Thierry Gillybœuf, Le parole sono importanti
Olivier Rey, Langue inclusive et amerture en milieu universitaire
Charlotte Abramovitch, L D I
Benoît Duteurtre, Retour à l’expéditeur
Yvan Gradis, Correcteur antiteurtriste
Sylvie Perez, Le langage inclusif ou la tragédie de l’Europe centrale
Marilia Amorim, Inclure, exclure – Langue et discours
Fulvio Caccia, La nouvelle querelle des Anciens et des Modernes
Cyril de Pins, Confessions d’un point bavard
Ariane Bilheran, Totalitarisme et novlangue – Déconstruction et reconstruction de la langue
Denis Grozdanovitch, Une écriture très exclusive
Yves Lepesqueur, Quand le singe n’aime plus sa forêt – Paulhan, Dhôtel et la confiance perdue
Patrice Charrier, Trouble dans la langue
Philippe Renonçay, Le remords du langage
Steven Sampson, Le récit d’un point
Morgan Sportes, D’où parles-tu camarade ?
Jean-Yves Masson, À l’écriture inclusive, préférez donc l’espéranto
Lakis Proguidis, Après la société

À la une : Trevor Cribben Merrill

Critiques
Massimo Rizzante, Le kitsch, ou bien un des malentendus sur l’œuvre de Kundera
Baptiste Arrestier, Le dernier roman du xxe siècle – L’Infinie Comédie, de David Foster Wallace

À la une : Théo Ananissoh

De près et de loin
Jacques Dewitte, De quoi nos langues sont-elles menacées ?
Philippe Roussel, Un type que personne ne connaît : René Béhaine165

 À la une : Yannick Roy

Au fil des lectures
Marek Bieńczyk, 1943

 

Ouverture

OUVERTURE

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Du langage dit inclusif

 

 

Le parti de l’humour est en deuil. Il vient de perdre l’un de ses plus éminents représentants: Benoît Duteurtre. Et L’Atelier du roman vient de perdre l’ami cher, le collaborateur fidèle, le compagnon précieux dans toutes ses activités et le convive, toujours aimable, toujours plaisant, de ses fêtes.

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Depuis quelques années nous sommes témoins de plusieurs initiatives concernant l’application dans tous les domaines de la vie du langage dit inclusif. Des universités, des mairies, des secteurs entiers de la communication et du commerce et des cercles de linguistes prennent part à la substitution de notre langue (garantie par la Constitution) par un langage artificiel qu’on veut croire salutaire pour l’égalité des sexes.

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Que l’on veuille ajouter à l’éternelle quête de la provenance des langues la différenciation sexuelle, il n’y a aucun mal, au contraire même. Ce sera un enrichissement pour le savoir. Mais passer à l’acte, fournir des solutions, déformer la langue officielle, édifier à l’intérieur de la société française une communauté langagière distincte, introduire donc, forcément, une rupture générationnelle là où doit régner la continuité et la transmission, ce sont là des signes qui ne peuvent pas laisser les écrivains indifférents.

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Un grand merci à tous les participants dans cette défense de notre langue.

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Et voilà qu’aujourd’hui, avec une autosatisfaction inouïe, des technos, persuadés que la Terre a attendu leur venue au monde pour commencer sa rotation, voudraient transformer la langue. Il faut se représenter la confiance qu’ils ont en eux, ces «gestionnaires du monde qui change», pour s’en prendre à la langue française, vieille dame punk. Imaginons la scène: ils se lèvent le matin, se regardent dans la glace et se disent: «Je vais réformer la langue, fleurie par Marie de France, stabilisée par les Valois, soulevée par Rabelais, solennisée par Racine, déliée par Marivaux, polie par Montesquieu, enluminée par Hugo, illuminée par Rimbaud, stratosphérisée par Breton, électrocutée par Céline, solarisée par Camus, évangélisée par Mauriac – je vais la réinventer totalement, moi, Mme Michu de l’écriture inclusive et moi M. Jourdain de la vigilance lexicale.» Quel culot!
Sylvain Tesson, Le Figaro, 3 décembre 2021.

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Avec la parution ce printemps des deux derniers volumes se complète le Journal de Philippe Muray. Trésor inépuisable (Philippe Roussel).

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Si l’article de Jacques Dewitte ainsi que les chroniques de Trevor Cribben Merrill et de Yannick Roy résonnent de manière contrapuntique avec le principal sujet, c’est le divin hasard qui l’a voulu.

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Kundera. Un an de sa mort. Il est tout à fait dans la logique des choses que Massimo Rizzante rende hommage à Kundera par un article centré sur le kitsch.

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Il y a quatorze ans, en 2010, nous avons consacré un numéro entier à la défense du français, sous le titre «Parlons du français». À l’époque, c’était pour réagir à l’abandon massif du français en faveur de l’anglais. Aujourd’hui, face aux mesures prises, ici ou là, pour promouvoir un langage a-historique, un langage qui coupe les liens avec la langue, à savoir avec la plus magnifique, la plus grandiose création collective, la menace vient pour ainsi dire de l’intérieur. Et c’est notre devoir de réagir de nouveau.

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Il n’y aurait ni langue, ni société, ni histoire, ni rien si un Français ordinaire d’aujourd’hui n’était pas capable de comprendre aussi bien Le Rouge et le Noir ou même les Mémoires de Saint-Simon qu’un texte novateur d’un écrivain original. Oublier cela, ce serait oublier cette autre fonction fondamentale de la langue, qui est d’assurer à toute société un accès à son propre passé.
Cornelius Castoriadis, L’Institution imaginaire de la société, 1975.

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Heureuse coïncidence. Dans le même numéro, trois écrits sur les maux qui pèsent sur la conscience occidentale et que l’art ne cesse d’interroger. À savoir, la colonisation (Théo Ananissoh), les camps d’extermination (Marek Bieńczyk) et le nihilisme couramment appelé postmodernisme (Baptiste Arrestier).

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Au romancier Benoît Duteurtre nous avons consacré le 76e numéro (décembre 2013): «Étonnez-nous, Benoît!» Nous y reviendrons, certainement. Ici, nous reprenons quatre des dessins de son cher ami Sempé qui illustrent cette publication. Tous portaient comme légende, avec l’accord de Sempé, des titres des ouvrages de Duteurtre.
L. P.