L'Atelier du Roman n° 123
Tchicaya U Tam’si – Modernité et tradition
Ce dernier numéro de l’année est consacré au poète et romancier Tchicaya U Tam’si (1931-1988). Originaire du Congo, Tchicaya est arrivé en France à l’âge de quinze ans et il y a vécu jusqu’à sa mort. Le poète Tchicaya est bien connu et reconnu en France, dans plusieurs pays africains et dans les Caraïbes. Mais avec ce numéro nous voulons surtout parler de Tchicaya romancier. Parce que ses romans sont aussi importants que sa poésie. Parce que ses romans constituent une voix unique et inimitable dans l’histoire de l’art du roman. Et parce que, écrits sur fond de l’histoire du Congo au xxe siècle, ils nous font réfléchir, comme tous les grands romans, sur l’écart entre les bonnes intentions de construire un monde meilleur, et la réalité désastreuse. Dans ce numéro, nous parlons aussi d’autres grands romanciers (Singer, Roy, Doyle, Tokarczuk), du cinéma, du tatouage et des retombées existentielles du tout numérique.
Sommaire
-
SOMMAIRE
L'Atelier du Roman n° 123Tchicaya U Tam’si – Modernité et tradition
SOMMAIRE
Ouverture
Naissance d’un hommage à Tchicaya U Tam’si romancier, à la suite d’un compte rendu de Marius Nguié
Landry-Wilfrid Miampika M., Tchicaya U Tam’si, arc de la poésie et du roman
Boniface Mongo-Mboussa, «Je n’écris pas : je rends conte »
Yvette Balana, Conter la déposition
Bernard Mouralis, La fin de l’histoire ou les morts sans sépulture
Myriam Olah Muanasaka, Des mots surgissant du ventre de l’Afrique
Théo Ananissoh, Quelques idées sur Tchicaya U Tam’si
Xavier Garnier, Le roman familial des « morts-vivants »
Thierry Gillybœuf, Cœlacanthe frétillant dans l’ancien ténèbre
Lakis Proguidis, Les évolués
Dates et œuvres
À la une : Olivier Maulin
Critiques
Reynald Lahanque, L’obsolescence de la vie privée: Dave Eggers
Raphaël Arteau Mcneil, Les trois mères – Une lecture de Bonheur d’occasion, de Gabrielle Roy
Filippo Vanni, Du cinéma au roman – Ils ont tous raison, de Paolo Sorrentino
Baptiste Arrestier, Les ananas de Moorea – Les Pérégrins, d’Olga Tokarczuk
Massimo Rizzante, Dieu, sexe, littérature – Sur Isaac Bashevis Singer
À la une : Trevor Cribben Merrill
De près et de loin
Anna Ayanoglou, Transfigurations
Riccardo Pineri, L’effacement du visage dans les pratiques du tatouage
Samuel Bidaud, L’écrivain contre l’écriture, ou de l’agraphophobie
À la une : Théo Ananissoh
Au fil des lectures
Marek Bieńczyk, Fumer un cigare par les temps qui courent Ouverture
-
OUVERTURE
L'Atelier du Roman n° 123Tchicaya U Tam’si – Modernité et tradition
Si, après les « indépendances » des années soixante, il est un écrivain dont l’œuvre illustre parfaitement la « Renaissante Afrique » que Léopold S. Senghor réclamait de toutes ses forces, c’est bien Tchicaya U Tam’si (1931-1988). Car il a su incarner le geste primordial de toute renaissance : aller se ressourcer dans le passé le plus reculé afin d’assurer un renouveau artistique et spirituel à vocation universelle. Ce qui l’a conduit au fleuve Congo et à ses peuples et tribus aux traditions séculaires.
*
Infinis remerciements à Boniface Mongo-Mboussa, fin connaisseur et défenseur infatigable de l’œuvre de Tchicaya U Tam’si. Non seulement il est à l’origine du présent hommage, mais il nous a aidés dans toutes les phases du dossier.
*
Cent vingt-deux numéros et nous n’avions parlé ni d’Isaac Bashevis Singer (Massimo Rizzante) ni de Conan Doyle (Olivier Maulin)… Mais nous reparlons ici de Gabrielle Roy (Raphaël Arteau McNeil) et d’Olga Tokarczuk (Baptiste Arrestier). La famille s’élargit.
*
« Un grand artiste est celui à qui l’obstacle sert de tremplin », disait Gide. On dirait qu’il avait en tête Tchicaya U Tam’si et ses poèmes, ses pièces de théâtre et ses romans. Dans ce numéro nous parlons surtout du Tchicaya U Tam’si romancier. Comme poète, il est connu, aimé et abondamment commenté. Il est donc temps de compléter son image. Car il est aussi un grand romancier.
*
Rien ne remplace la lecture d’un bon livre. Surtout lorsque celui-ci ouvre à d’autres lectures (Marek Bieńczyk) ou quand il nous fait connaître un pays où nous n’irons probablement jamais (Théo Ananissoh). Et ça ne coûte pas cher !
*
Ne confondons pas graphomanie, maladie commune, avec agraphophobie, maladie noble (Samuel Bidaud).
*
Sous la plume de Tchicaya U Tam’si, des humiliations et des malheurs de tout un peuple et de tout un continent jaillit une humanité qu’aucun maître ne saura soumettre pour toujours.
Parfois je pense que peuple et grand poète sont des notions synonymes.*
Nos calculs ont débordé notre conception ; nous avons mangé plus que nous ne pouvons digérer. La pratique des sciences qui ont étendu les limites de l’empire de l’homme sur le monde extérieur a proportionnellement restreint, par défaut de faculté poétique, celles du monde intérieur ; et l’homme, qui a réduit les éléments en esclavage, reste lui-même un esclave.
Shelley, Défense de la poésie, 1821.*
Depuis les choses ont progressé : des esclaves sans vie privée, d’après la lecture de Reynald Lahanque du roman de Dave Eggers.
*
Infinis remerciements à France Dumas pour nous avoir autorisés à reprendre son dessin de Tchicaya U Tam’si.
*
Tous les chemins mènent au roman : une réflexion sur la pratique du tatouage (Riccardo Pineri), une autre sur les épigraphes (Trevor Cribben Merrill) et, évidemment, le cinéma (Filippo Vanni).
*
Chers lecteurs, avez-vous jamais essayé de traduire dans notre langue les mots anglais que nous utilisons trois milles fois par jour ? (Anna Ayanoglou).
*
Programme 2026 :
Mars, « Lire et relire Rabelais » – sont rassemblés les articles des participants à la IVe et dernière Rabelaisiade qui a eu lieu à Chinon les 4 et 5 octobre 2025 ;
Juin, « Pourquoi sommes-nous sans nouvelles ? (Suite sans fin) » – un an après, nous revenons au même sujet, tant il y a encore des choses à dire en faveur de la nouvelle ;
Septembre, « Alphonse Allais » – hommage à nos prédécesseurs qui ont su rire avec leur monde ;
Décembre, « Alejo Carpentier » – pour finir l’année en beauté romanesque et musicale.
L. P.