Couverture du n° 120 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 120

Lire et relire Rabelais (III) – XIe Rencontre de Thélème

 

 

Ce numéro illustre bien la conviction profonde de L’Atelier du roman selon laquelle seul le renforcement de nos liens avec les grandes œuvres du passé peut authentifier notre réflexion sur les enjeux de notre monde. Ainsi, dans ce numéro se côtoient nos pages sur Rabelais – fruit de la IIIe Rabelaisiade qui a eu lieu à Chinon l’automne dernier – et nos pages où il est question de l’intelligence artificielle et de l’emprise grandissante des images numériques sur nos vies et nos rapports avec les autres. Deux mondes: L’un bâti sur l’euphorie de la création, l’autre sur l’inquiétude généralisée devant les avancées spectaculaires de la technique. Et il n’y a pas que Rabelais pour aiguiser notre pensée. Car nous parlons aussi de Cervantès, d’Octavio Paz, d’Ernesto Sabato, de Pasolini et de Kundera. Et nous publions un long entretien de Jean-Michel Delacomptée sur la grandeur du français et les dangers qu’il encourt dans un monde où l’efficacité l’emporte sur le sens et la beauté.


SOMMAIRE

Couverture du n° 120 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 120

Lire et relire Rabelais (III) – XIe Rencontre de Thélème

SOMMAIRE

Ouverture

Thierry Gillybœuf, Panurge, l’incompris
Francesco Forlani, Les géants sur les épaules des nains
Boniface Mongo-Mboussa, Rabelais, conteur martiniquais
Lakis Proguidis, Un cinquième livre ?
Lenka Hornadova-Civade, Sur les traces de Rabelais chez les Tchèques
Jacky Vellin, Panurge et la naissance du roman
Reynald Lahanque, Rabelais à l’école : mission impossible ?
Charles Villalon, C2H5-OH
Steven Sampson, Proguigruel
Cyril de Pins, Du personnage de roman

 À la une : Trevor Cribben Merrill

Critiques
Christian Salmon, La beauté des choses inaccomplies – Pour Milan Kundera
Nunzio D’Annibale, Le triomphe de la paralittérature
Daniel et Dominique Ilea, Vocation d’écrivain – Un an de solitude et autres histoires livresques, de Jean-Pierre Longre
Jean-Marc Bastière, Rencontre rêvée – Échec et mat au Paradis, de Sébastien Lapaque

 À la une : Marion Messina

De près et de loin
Emmanuel Bluteau, Jean Prévost, maître d’œuvre de Problèmes du roman
Jean-Michel Delacomptée – jean berthier, Notre langue (entretien)
Charlotte Abramovitch, La bibliothèque de Babel

 À la une : Yannick Roy

Au fil des lectures
Massimo Rizzante, Diptyque – Ernesto Sabato et Octavio Paz

Discussion
Philippe Raymond-Thimonga – Lakis Proguidis, Adrian Æ : le roman face à l’image

 


OUVERTURE

Couverture du n° 120 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 120

Lire et relire Rabelais (III) – XIe Rencontre de Thélème

Dans ce numéro se côtoient le lointain passé et le proche avenir. Cela commence avec les prouesses de Pantagruel et se termine avec les exploits de la Silicon Valley. Au début, il y a des écrits sur l’œuvre de Rabelais, à la fin une discussion avec Philippe Raymond-Thimonga, auteur d’Adrian Æ, roman de 2022 où il est principalement question de l’emprise des images sur nos vies. Côté passé, l’euphorie de la création, côté présent, la stérilité de l’esprit devant les « avancées » de la science.

Les pages sur Rabelais sont le fruit de la troisième Rencontre du cycle des Rencontres annuelles de Thélème «Lire et relire Rabelais». Ce ne sont pas des «actes». Il s’agit des textes rédigés bien après la discussion qui a eu lieu à Chinon l’automne dernier. Que les participants en soient amplement remerciés.

Je tiens à remercier la Région Centre-Val de Loire, la Communauté de communes Chinon-Vienne et Loire et l’association Autour de Babel. C’est grâce à leur soutien que les Rencontres de Thélème sont reconduites d’année en année.
Je tiens aussi à remercier Michel Garcia et Françoise Bergot pour leur aide inappréciable à l’organisation de cette Rencontre.

«Défense et illustration de la langue française» version 2025: entretien de Jean-Michel Delacomptée avec Jean Berthier. Pour compléter le numéro 118 de septembre dernier consacré au langage dit inclusif.

Coïncidence significative. De Los Angeles nous parvient la chronique de Trevor Cribben Merrill dédiée à l’intelligence artificielle. Des deux côtés de l’Atlantique nous avons apparemment à faire avec les mêmes inquiétudes face à la prise en main de l’humain par la «Mégamachine» (Lewis Mumford).

Tout ce qui ressortit désormais à la logique algorithmique ou numérique et qui esbaudit si étourdiment les thuriféraires du monde informatique n’est que le prolongement de l’appréhension du monde dominée par les chiffres et les schémas, et qui n’a plus grand-chose à voir avec ce que les philosophes humanistes d’antan nommaient l’Entendement.
Denis Grozdanovitch, Une affaire de style, 2025.

Je ne connais pas de meilleur exemple de création collective sous l’Occupation allemande que le double numéro de Confluences sous le titre «Problèmes du roman», paru à Lyon en 1943. Y ont participé cinquante-cinq écrivains. De Simenon à Aragon et de Camus à Stein. Emmanuel Bluteau nous parle du maître d’œuvre Jean Prévost, mort au combat, et de son extraordinaire aventure littéraire. Espérons qu’un éditeur s’intéressera à réimprimer cet ouvrage, unique dans les annales de la «Pensée du roman» (Thomas Pavel).

Plus nous nous exposons, bon gré mal gré, aux ondes des centrales numériques, plus nous avons besoin de nos maîtres: Pasolini (Marion Messina), Kundera (Christian Salmon), Cervantes (Yannick Roy) et Paz et Sabato (Massimo Rizzante).

Et regardons aussi ce qui se fait de nos jours côté roman et dont parlent Daniel et Dominique Ilea, Nunzio d’Annibale et Jean-Marc Bastière.

Il y a treize ans, Benoît Duteurtre s’étonnait dans sa chronique (no 71, septembre 2012) du fait que la gare Saint-Lazare, après de coûteux travaux de rénovation, eût l’air d’un grand centre commercial identique à ceux qui poussent dans le monde entier. Il ne faut plus que la chose corresponde au mot: c’est la règle d’or de nos sociétés. Ainsi pour les bibliothèques (Charlotte Abramovitch).
L. P.

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Fellini et les écrivains

 

 

Pour le cinéma il y a de bonnes revues spécialisées. Si, avec ce 119e numéro, nous débordons notre cadre, c’est pour parler de Fellini, d’un metteur en scène atypique, d’un metteur en scène pour qui la grande littérature a été l’antichambre de ses créations cinématographiques. Fellini n’a pas réalisé des adaptations; il s’est inspiré des «matériaux» littéraires pour réaliser son univers filmique où se mêlent sans arrêt bouffonnerie et rêve. Sources peut-être de tous les arts. Dans le reste de la matière, sur fond d’œuvres romanesques importantes, chroniques et critiques se réunissent dans un voyage intercontinental. (En partenariat avec la Fondation Fellini pour le cinéma).


SOMMAIRE

Couverture du n° 119 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 119

Fellini et les écrivains

 

 

SOMMAIRE

Ouverture

Federico Fellini, Poe à Venise
Daniela Barbiani, Quand le réalisateur cache l’écrivain
Stefano Godano, Fellini, Kafka et Kundera
Stéphane Marti, Fellini – Le miroir de Dante
Federico Fellini, Entretien avec Antonio Debenedetti sur Franz Kafka
Guy Scarpetta, Notes éparses sur Federico Fellini
Pietro Citati, Fellini, le candide qui parle à la lune...
Salman Rushdie, Notes sur la paresse : de Saligia à Oblomov (extrait)
Guilermo Cabrera infante, Une vision de Fellini
Federico Fellini, Lettre à Spagnol sur Tolstoï
Hugo Chaparro valderrama, Le passé, le présent et le royaume de la fantaisie
Georges Simenon, Fellini
Daniele del Giudice, Les rêves bien tempérés de Federico Fellini
Federico Fellini, Tutto è finto nel cinema
Milan Kundera, Kafka, Heidegger, Fellini
Vincenzo Mollica, Fellini mon ami – Extrait, Schulz-Fellini
Ermano Cavazzoni, Fellini taoïste
Italo Calvino, Autobiographie d’un spectateur (extrait)
Federico Fellini, À propos d’Othello
Gianni Celati, Fellini et le mâle italien
Massimo Rizzante, Fellini et la vulgarité divine

Dates et œuvres

À la une : Olivier Maulin

À la une : Yves Lepesqueur

Critiques
Bernard Quiriny, Les doigts dans le nez (En mémoire de Benoît Duteurtre)
Reynald Lahanque, « L’écho de la voix du conteur » – Théodoros, de Mircea Cărtărescu
Raphaël Arteau Mcneil, La peur de Mrs Dalloway
Lakis Proguidis, La Plaisanterie ou Kundera et le monde qui ne plaisante pas

À la une : Boniface Mongo-Mboussa

Au fil des lectures
Isabelle Daunais, À la table de Middlemarch

 


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Fellini et les écrivains

 

 

Ce numéro est le fruit d’une idée de Daniela Barbiani et de Stefano Godano: si vous faisiez un numéro sur le rôle qu’ont joué les grands écrivains dans la vie et l’œuvre de Fellini? Excellente idée! Ainsi le cinéma peut entrer dans notre atelier sans que nous soyons obligés de nous lancer dans des bavardages sur les supposés rapports entre le roman et le cinéma.

Ce qui me fascine dans ce qu’a fait Kafka, c’est que son Amérique existe. Comme je voulais reconstruire une Amérique en studio à Rome, je suis confronté au fait qu’un grand écrivain, visionnaire, névrotique, a refait son Amérique à partir de petites suggestions, et avec son génie, il a transmis une Amérique qui va durer beaucoup plus longtemps que l’Amérique réelle.
Federico Fellini, entretien avec Alain Finkielkraut, Le Messager européen, no 1, 1987.

Infinis remerciements à la Fondation Fellini pour le cinéma et son président, Stéphane Marti, pour leur soutien financier et leurs conseils amicaux.

Daniela Barbiani, nièce de Federico Fellini, n’a pas seulement eu l’idée de cet hommage à Fellini. Elle nous a autorisés à reproduire des dessins de Fellini provenant de sa collection. Qu’elle soit grandement remerciée.

Et infinis remerciements aussi à Massimo Rizzante qui a coordonné l’ensemble de la matière et qui, comme professeur de littérature comparée à l’Université de Trento, s’est chargé de la partie administrative avec la Fondation Fellini pour le cinéma.

Un grand absent dans ce dialogue inter-artistique: Benoît Duteurtre. Cet été il est parti dans son village avec l’intention, entre autres, de terminer son article sur Fellini. Les cieux en ont décidé autrement. À sa mémoire, nous reprenons l’article de Bernard Quiriny publié dans le numéro consacré à Duteurtre, «Étonnez-nous, Benoît!» (no 76, décembre 2013), avec l’autorisation de l’auteur qui a eu la gentillesse d’ajouter quelques mots sur la pérennité de l’œuvre de Duteurtre.

Pour paraphraser Milan Kundera parlant de l’Europe, je dirai qu’une revue de réflexion esthétique est une revue qui concentre dans le plus petit espace la plus grande diversité esthétique, culturelle et historique. Ici, George Eliot (Isabelle Daunais) et Virginia Woolf (Raphaël Arteau McNeil) côtoient Bossuet (Yves Lepesqueur), Frantz Fanon et la littérature des indépendances (Boniface Mongo-Mboussa), le Kundera de l’époque du Printemps de Prague (celui qui signe) et deux importants romanciers de nos jours, Patrice Jean (Olivier Maulin) et Mircea Cărtărescu (Reynald Lahanque). Bien sûr, le hasard avant tout et, peut-être, l’esprit de Fellini.

Un grand merci à tous les collaborateurs et, aussi, à Francesca Lorandini pour son aide discrète.

Le clown exerce sur moi un profond attrait (bien que je ne m’en sois pas toujours douté), justement parce qu’entre le monde et lui se dresse le rire. Son rire à lui n’a jamais rien d’homérique. C’est un rire silencieux, sans gaieté comme on dit. Le clown nous apprend à rire de nous-mêmes. Et ce rire-là est enfanté par les larmes.
Henry Miller, Le Sourire au pied de l’échelle, 1948.

La photo de Fellini est prise sur le set de E la Nave va, Teatro 5, Cinecittà, le 16 mars 1983. Photographie réalisée par Yves Reichenbach pour la revue Questions, no 1, mai 1983. Avec l’aimable autorisation de la revue.

Cinéma-littérature! un rapprochement qui naît en général de rapports polémiques, de priorités vaines, de dépendances fictives. Chaque œuvre d’art vit dans la dimension dans laquelle elle a été conçue et exprimée; la transférer, la transposer de son langage originaire à un autre, différent, veut dire l’effacer, la nier.
Federico Fellini, Faire un film, 1996.

Programme 2025: Mars, «Lire et relire Rabelais» – sont rassemblés les articles des participants à la IIIe Rabelaisiade, qui a eu lieu à Chinon les 5 et 6 octobre 2024. Juin, «Pourquoi sommes-nous sans nouvelles?» – en effet, pourquoi notre République des lettres est-elle réfractaire aux nouvelles? Septembre, «André Dhôtel» – pour ne pas oublier les oubliés. Et décembre, «Tchicaya U’Tamsi» – pour ne pas oublier l’Afrique.
L. P.

Couverture du n° 118 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 118

Du langage dit inclusif

 

 

En absence des principaux intéressés, les écrivains, le langage dit inclusif se répand partout. De l’université au commerce et de l’administration à la publicité, rien n’est épargné. En absence des écrivains, à savoir de ceux dont la parole en la matière fait, a priori, autorité, on essaie d’imposer à l’ensemble de la société une conception de la langue étrangère à tout savoir établi et approuvé, et d’inventer des applications oscillant entre l’absurde et le ridicule. Il est urgent d’en discuter; c’est notre devoir. La langue est notre maison et le trésor que nous ont légué les générations qui nous ont précédé. De tous les sujets qui doivent faire débat dans toutes les couches de la population, celui du langage dit inclusif est d’une priorité absolue. Il va de la survie de notre société.
Et puis, nous parlons aussi des œuvres romanesques importantes (Kundera, Wallace) et, dans nos chroniques, cosmopolitisme oblige, nous survolons le monde de Los Angeles à Varsovie en passant par Montréal et le Cameroun. .


SOMMAIRE

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Du langage dit inclusif

 

 

SOMMAIRE

Ouverture

François Taillandier, L’inclusivisme est à nos portes
Belinda Cannone, Il était une fois – Du genre dans la littérature
Jean-Michel Delacomptée, Sermon sur la misère de l’écriture inclusive
Reynald Lahanque, Art inclusif (d’après Paul.e Verlain.e)
Thierry Gillybœuf, Le parole sono importanti
Olivier Rey, Langue inclusive et amerture en milieu universitaire
Charlotte Abramovitch, L D I
Benoît Duteurtre, Retour à l’expéditeur
Yvan Gradis, Correcteur antiteurtriste
Sylvie Perez, Le langage inclusif ou la tragédie de l’Europe centrale
Marilia Amorim, Inclure, exclure – Langue et discours
Fulvio Caccia, La nouvelle querelle des Anciens et des Modernes
Cyril de Pins, Confessions d’un point bavard
Ariane Bilheran, Totalitarisme et novlangue – Déconstruction et reconstruction de la langue
Denis Grozdanovitch, Une écriture très exclusive
Yves Lepesqueur, Quand le singe n’aime plus sa forêt – Paulhan, Dhôtel et la confiance perdue
Patrice Charrier, Trouble dans la langue
Philippe Renonçay, Le remords du langage
Steven Sampson, Le récit d’un point
Morgan Sportes, D’où parles-tu camarade ?
Jean-Yves Masson, À l’écriture inclusive, préférez donc l’espéranto
Lakis Proguidis, Après la société

À la une : Trevor Cribben Merrill

Critiques
Massimo Rizzante, Le kitsch, ou bien un des malentendus sur l’œuvre de Kundera
Baptiste Arrestier, Le dernier roman du xxe siècle – L’Infinie Comédie, de David Foster Wallace

À la une : Théo Ananissoh

De près et de loin
Jacques Dewitte, De quoi nos langues sont-elles menacées ?
Philippe Roussel, Un type que personne ne connaît : René Béhaine165

 À la une : Yannick Roy

Au fil des lectures
Marek Bieńczyk, 1943

 


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Du langage dit inclusif

 

 

Le parti de l’humour est en deuil. Il vient de perdre l’un de ses plus éminents représentants: Benoît Duteurtre. Et L’Atelier du roman vient de perdre l’ami cher, le collaborateur fidèle, le compagnon précieux dans toutes ses activités et le convive, toujours aimable, toujours plaisant, de ses fêtes.

*

Depuis quelques années nous sommes témoins de plusieurs initiatives concernant l’application dans tous les domaines de la vie du langage dit inclusif. Des universités, des mairies, des secteurs entiers de la communication et du commerce et des cercles de linguistes prennent part à la substitution de notre langue (garantie par la Constitution) par un langage artificiel qu’on veut croire salutaire pour l’égalité des sexes.

*

Que l’on veuille ajouter à l’éternelle quête de la provenance des langues la différenciation sexuelle, il n’y a aucun mal, au contraire même. Ce sera un enrichissement pour le savoir. Mais passer à l’acte, fournir des solutions, déformer la langue officielle, édifier à l’intérieur de la société française une communauté langagière distincte, introduire donc, forcément, une rupture générationnelle là où doit régner la continuité et la transmission, ce sont là des signes qui ne peuvent pas laisser les écrivains indifférents.

*

Un grand merci à tous les participants dans cette défense de notre langue.

*

Et voilà qu’aujourd’hui, avec une autosatisfaction inouïe, des technos, persuadés que la Terre a attendu leur venue au monde pour commencer sa rotation, voudraient transformer la langue. Il faut se représenter la confiance qu’ils ont en eux, ces «gestionnaires du monde qui change», pour s’en prendre à la langue française, vieille dame punk. Imaginons la scène: ils se lèvent le matin, se regardent dans la glace et se disent: «Je vais réformer la langue, fleurie par Marie de France, stabilisée par les Valois, soulevée par Rabelais, solennisée par Racine, déliée par Marivaux, polie par Montesquieu, enluminée par Hugo, illuminée par Rimbaud, stratosphérisée par Breton, électrocutée par Céline, solarisée par Camus, évangélisée par Mauriac – je vais la réinventer totalement, moi, Mme Michu de l’écriture inclusive et moi M. Jourdain de la vigilance lexicale.» Quel culot!
Sylvain Tesson, Le Figaro, 3 décembre 2021.

*

Avec la parution ce printemps des deux derniers volumes se complète le Journal de Philippe Muray. Trésor inépuisable (Philippe Roussel).

*

Si l’article de Jacques Dewitte ainsi que les chroniques de Trevor Cribben Merrill et de Yannick Roy résonnent de manière contrapuntique avec le principal sujet, c’est le divin hasard qui l’a voulu.

*

Kundera. Un an de sa mort. Il est tout à fait dans la logique des choses que Massimo Rizzante rende hommage à Kundera par un article centré sur le kitsch.

*

Il y a quatorze ans, en 2010, nous avons consacré un numéro entier à la défense du français, sous le titre «Parlons du français». À l’époque, c’était pour réagir à l’abandon massif du français en faveur de l’anglais. Aujourd’hui, face aux mesures prises, ici ou là, pour promouvoir un langage a-historique, un langage qui coupe les liens avec la langue, à savoir avec la plus magnifique, la plus grandiose création collective, la menace vient pour ainsi dire de l’intérieur. Et c’est notre devoir de réagir de nouveau.

*

Il n’y aurait ni langue, ni société, ni histoire, ni rien si un Français ordinaire d’aujourd’hui n’était pas capable de comprendre aussi bien Le Rouge et le Noir ou même les Mémoires de Saint-Simon qu’un texte novateur d’un écrivain original. Oublier cela, ce serait oublier cette autre fonction fondamentale de la langue, qui est d’assurer à toute société un accès à son propre passé.
Cornelius Castoriadis, L’Institution imaginaire de la société, 1975.

*

Heureuse coïncidence. Dans le même numéro, trois écrits sur les maux qui pèsent sur la conscience occidentale et que l’art ne cesse d’interroger. À savoir, la colonisation (Théo Ananissoh), les camps d’extermination (Marek Bieńczyk) et le nihilisme couramment appelé postmodernisme (Baptiste Arrestier).

*

Au romancier Benoît Duteurtre nous avons consacré le 76e numéro (décembre 2013): «Étonnez-nous, Benoît!» Nous y reviendrons, certainement. Ici, nous reprenons quatre des dessins de son cher ami Sempé qui illustrent cette publication. Tous portaient comme légende, avec l’accord de Sempé, des titres des ouvrages de Duteurtre.
L. P.

Couverture du n° 117 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 117

Simenon – Le peuple du roman

 

 

La doxa critique veut qu’une grande œuvre romanesque ne saura être lue et appréciée à sa juste valeur que par un public restreint. Simenon – et, fort heureusement, il n’est pas le seul – prouve concrètement, réellement, que grand art et enthousiasme populaire ne sont pas des termes antagonistes. Peut-être que Simenon ne fera jamais partie d’une nomenclature avant-gardiste. Tant pis ou tant mieux. Dans tous les cas, nous l’aimons. Nous le lisons et relisons. Parce qu’il appartient, définitivement, à la grande lignée de Cervantès, de Balzac, de Dickens et de Tolstoï.
Nous parlons aussi de quelques indispensables (Powys, Malamud, Kundera et Kafka), sans oublier de scruter notre avenir de tout virtuel (Philippe Raymon-Thimonga) ou de nourrir la réflexion sur l’art du roman (Denis Wetterwald).


SOMMAIRE

Couverture du n° 117 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 116

Simenon – Le peuple du roman

 

 

SOMMAIRE

Ouverture

Massimo Rizzante, La peur et le crime
Michel Biron, Il n’y a pas de parce que
Bernard Quiriny, Abécédaire Simenon
Manuel Candré, Prénom Jules
Francesco Forlani, Une vérité nue
Alberto Savinio, Georges Simenon
Thierry Gillybœuf, Mystique du perroquet
Marin de Viry, La cuisine bourgeoise contre le crime
François Bordes, L’accointance Simenon
Slobodan Despot, La Possession
Nunzio Casalaspro, La parole perdue
Loïc Barrière, Simenon, un maître
Reynald Lahanque, La fatigue d’exister
Charles Villalon, La disparition de Paris
Lakis Proguidis, C’était encore hier
Dates et œuvres

À la une : Yves Lepesqueur

Critiques
Alphonse Cugier, Ce rêve ancien d’un homme nouveau – Adrian Æ, de Philippe Raymond-Thimonga
Lenka Hornakova-Civade, L’art de disparaître en beauté – Milan Kundera
Jérôme Couillerot, Attendre comme un Malamud – Bernard Malamud
Florence Marie, After my fashion : L’atelier d’écriture de John Cowper Powys

À la une : Marion Messina

De près et de loin
Raphaël Arteau mcneil, La fatigue de Joseph K.
Denis Wetterwald, Florilège

À la une : Boniface Mongo-Mboussa

Au fil des lectures
François tTaillandier, What’s better than money ?

 


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Simenon – Le peuple du roman

 

 

Un numéro sur Simenon peut paraître superflu. Que peut-on dire de nouveau sur l’homme et ses œuvres après tant de spécialistes, de biographes, de chercheurs, de critiques et d’admirateurs? Sa gloire est faite. Les grands écrivains et artistes de son temps, de Gide à Fellini, ont reconnu son extraordinaire talent. Que reste-t-il à faire?

Dans L’Atelier du roman nous avons le plus souvent parlé de romanciers importants injustement écartés de la scène littéraire contemporaine. Rarement avons-nous consacré nos pages à des romanciers célèbres dont les œuvres continuent à être éditées et rééditées. Le risque avec ces derniers n’est pas l’oubli mais l’enfermement de leurs œuvres dans les clichés et les lectures datées. Est-ce le cas pour Simenon? On ne le sait pas. Nous posons la question.

Pourquoi, de nos jours, l’homme se soumet-il si facilement aux nouvelles technologies? À cause de sa «honte prométhéenne», répond le philosophe (Günther Anders). Mais peut-être y a-t-il une toute autre raison, selon Alphonse Cugier, qui commente ici un roman de Philippe Raymond-Thimonga.

Nous parlons de nouveau de John Cowper Powys (Florence Marie) à qui nous avons consacré le 107e numéro (décembre 2021). Nous y reviendrons. Powys, plus probablement que tout autre grand romancier du xxe siècle, a senti ce que signifiait pour l’être humain le règne de la Machine.

Infinis remerciements à Francesco Forlani qui a enrichi nos pages sur Simenon avec l’article d’Alberto Savinio.

L’intelligence artificielle… On dit qu’on peut écrire des romans avec. Mais pourquoi en rajouter de nouveaux au détriment du temps pour observer les oiseaux (Yves Lepesqueur), pour lire Hésiode (Marion Messina), pour collectionner des définitions de l’art du roman (Denis Wetterwald) ou, encore, pour lire et commenter une romancière qui mériterait d’être plus connue (Boniface Mongo-Mboussa)?

Ce qui m’étonne le plus, c’est que les romans de Simenon soient au moins aussi lus dans les autres langues qu’ils le sont en français; il existe même des pays où ils touchent un public beaucoup plus étendu que dans le nôtre. Et pas plus les Américains que les Japonais, les Russes ou les Abyssins ne se sentent dépaysés dans ce monde romanesque où les êtres et les lieux sont pourtant, semble-t-il, très caractérisés, très particularisés.
Marcel Aymé, préface au Chien jaune, 1963.

«Au moment où Kafka attire plus d’attention que Joseph K., le processus de la mort posthume de Kafka est amorcé», écrivait Kundera dans L’Art du roman (1986). Au moins retardons cette mort autant que possible. D’où ce retour à Joseph K. (Raphaël Arteau McNeil).

La kunderologie est déjà en train de faire ses premiers pas. Malgré la volonté clairement affichée et les efforts de Kundera durant toute sa vie pour disparaître derrière son œuvre. Lenka Hornakova-Civade réfléchit sur le sens profond de cette «disparition».

Il y a de grands romanciers qui ont connu le succès dès le début de leur carrière. D’autres, comme Bernard Malamud, qui l’ont attendu en vain jusqu’à leur mort (Jérôme Couillerot).

Infinis remerciements aussi à François Taillandier pour la note contrapuntique qu’il apporte au thème principal.

La notion de peuple fait souvent penser à une multitude de gens qui partagent grosso modo les mêmes caractéristiques. Pour Simenon, le peuple est le plus fertile et quasi inépuisable terreau des singularités. S’il est lu et admiré par tant de nos écrivains aujourd’hui, il est probable que ce soit principalement pour cette raison.
Un grand merci à tous les participants.
L. P.

Couverture du n° 116 de L'Atelier du RomanL'Atelier du Roman n° 116

Lire et relire Rabelais – Xe Rencontre de Thélème

 

 

C’est pour la deuxième année consécutive que nous consacrons notre Rencontre de Thélème d’automne à Rabelais. Dans ce numéro paraissent les articles des participants rédigés, comme c’est la règle, après les interventions et les discussions qui ont eu lieu durant la Rencontre. Ce qui fait l’intérêt de ce « retour à Rabelais », c’est l’originalité et la singularité de chaque lecture. Ce qui est également le cas avec la précédente Rencontre (n° 113, juin 2023). De nos jours, le dialogue avec Rabelais est plus que nécessaire, il est vital. Donc, nous continuerons.
Dialogue que nous entreprenons, depuis la fondation de L’Atelier du roman, avec d’autres écrivains qui ont marqué l’histoire du roman – ici, avec Calvino, Kundera, Updike, Infante, Wilde, Gellhorn et Dutourd – et avec nos contemporains.


SOMMAIRE

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Lire et relire Rabelais – Xe Rencontre de Thélème

 

 

SOMMAIRE

Ouverture

yves lepesqueur, Les géants se marient
cyril de pins, Pour en finir avec la littérature constipée
Michel Garcia, Eduardo Barriobero Herrán, premier traducteur de Rabelais en espagnol
Olivier Maulin, Le géant des lettres
Fulvio Caccia, Libres enfants de l’algorithme
Denis Grozdanovitch, Rabelais
Lakis Proguidis, Une Muse pas comme les autres
Patrice Charrier, D’une abbaye l’autre
SimonaCarretta, Les invasions barbares – De Carpentier à Rabelais
Laurent Seyer, Rabelais, que la vie intérieure commence !

À la une : Théo Ananissoh

Entretien
Yves Hersant – Massimo Rizzante, Autour de l’œuvre d’Italo Calvino dans la Pléiade

Critiques
Maïa Hruskova, Milan Kundera : l’œuvre seule
Florian Beauvallet, Rabbit à la frontière – Sur le cycle Angstrom de John Updike
Juan Francisco Ferré, Quod eros demonstrandum – L’Éros romanesque de Guillermo Cabrera Infante
Charles Villalon, De toute vertu un poison est l’essence (Gellhorn)
Lakis Proguidis, De la violence (Messina, Levin, Maulin)

À la une : Olivier Maulin

De près et de loin
StevenSampson, Le père, le parc et la sainte-souris – La Réforme disneyienne
Raphaël Arteau Mcneil, Lectures du « Portrait de Dorian Gray » – Essai sur le nihilisme doux

Au fil des lectures
Benoît Duteurtre, Au fil des lectures (et autres considérations…)

 


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Lire et relire Rabelais – Xe Rencontre de Thélème

 

 

Une grande partie de ce numéro est le fruit des discussions qui ont eu lieu en octobre dernier à Chinon, durant la Rencontre de Thélème consacrée à Rabelais. Nous avons inauguré le cycle des Rencontres annuelles sur Rabelais en 2022 ; et en juin 2023 a paru le 113e numéro de L’Atelier du roman où étaient publiés les articles des participants. Articles rédigés, comme toujours, après la Rencontre. Maintenant, pareillement, il s’agit de textes spécialement écrits pour cette publication-ci.

Je tiens à remercier la Région Centre-Val de Loire, la Communauté de communes Chinon Vienne et Loire et l’association Autour de Babel. C’est grâce à leur soutien que les Rencontres de Thélème sont reconduites d’année en année.
Je tiens aussi à remercier Michel Garcia et Françoise Bergot pour leur aide inappréciable à l’organisation de cette Rencontre.

Jusqu’à aujourd’hui, au chapitre de Rabelais ouvert par L’Atelier, il n’y a pas deux articles qui se ressemblent. Il n’y a pas des approches qui vont dans le même sens. À la place d’un Rabelais réduit à des clichés bons pour les musées, l’école et le tourisme culturel, nous proposons le Rabelais dont nous avons besoin : toujours vivant, toujours apte à inspirer l’enthousiasme et toujours disposé au dialogue avec chaque lecteur et chaque écrivain sur les énigmes et les impasses de notre monde.

Aucune idée nouvelle ne pourra remplacer l’exemple des grands maîtres, nulle philosophie donner à la littérature son propre arbre généalogique, tout bruissant de noms qui nous remplissent d’orgueil. Nous n’avons pas le choix : on a le droit d’écrire comme Rabelais, Poe, Heine, Racine ou Gogol – ou pas du tout. L’héritage que nous a légué cette grande race demeure la seule loi qui nous gouverne.
Witold Gombrowice, Journal, 1953.

Dialogue. Je ne connais jamais d’avance le sujet sur lequel vont écrire nos chroniqueurs. Le hasard bienfaisant a voulu qu’il y ait dans ce numéro deux commentaires sur La Peau sur la table, de Marion Messina. L’un d’Olivier Maulin, l’autre de moi.

L’article de Maïa Hrušková sur Kundera est le troisième que nous publions après sa mort. Nous continuerons. Fidèles à son souhait, nous ne parlerons que de son œuvre, telle qu’il l’a voulue, telle qu’elle est dans les deux volumes de la Pléiade. Quant aux informations relatives à son édification, tout est dans la « Biographie de l’œuvre » spécialement rédigée par François Ricard pour cette édition.

Et il y a aussi, bien sûr, le dialogue de vive voix à l’instar de l’entretien entre Yves Hersant et Massimo Rizzante à propos d’Italo Calvino, dont une grande partie de l’œuvre sort en Pléiade ce printemps.

Et tandis que nous célébrions à Chinon les très riches heures de l’abbaye de Thélème, Steven Sampson dressait le portrait de celui qui a inventé et construit l’abbaye des animaux cartoonisés.

Une autre sorte de dialogue esthétique est de comparer les différentes lectures d’un même roman à travers les âges (Raphaël Arteau McNeil).

Chaque retour au passé, chaque relecture des œuvres d’antan, rend notre présent moins opaque. C’est ainsi que nous nous souvenons de Guillermo Cabrera Infante (Juan Francisco Ferré), de John Updike (Florian Beauvallet), de Martha Gellhorn (Charles Villalon) et de Jean Dutourd (Benoît Duteurtre).

Encore une variante dialogique : lire un roman de nos jours sur fond d’une autre époque (Théo Ananissoh).

Benoît Duteurtre proteste, à juste titre me semble-t‑il, contre le déplacement des bouquinistes afin de sécuriser le défilé fluvial des athlètes à l’ouverture des Jeux olympiques. Autres époques, autres soucis. Les Jeux olympiques panhelléniques ont duré 1170 ans. Tous les quatre ans, ce qui préoccupait les organisateurs était le respect absolu, pendant les Jeux, de la « trêve sacrée » sur tous les fronts.
L. P.